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HISTOIRE DU SOIR
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13 octobre 2015

BAKER KLINE, Christina : Le train des orphelins

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Christina BAKER KLINE, Le train des orphelins.
340 pages.
Editions Belfond (1 octobre 2015).

QUATRIEME DE COUVERTURE :

Entre 1854 et 1929, des trains sillonnaient les plaines du Midwest avec à leur bord des centaines d'orphelins. Au bout du voyage, la chance pour quelques-uns d'être accueillis dans une famille aimante, mais pour beaucoup d'autres une vie de labeur, ou de servitude.

Vivian Daly n'avait que neuf ans lorsqu'on l'a mise dans un de ces trains. Elle vit aujourd'hui ses vieux jours dans une bourgade tranquille du Maine, son lourd passé relégué dans de grandes malles au grenier.

Jusqu'à l'arrivée de Molly, dix-sept ans, sommée par le juge de nettoyer le grenier de Mme Daly, en guise de travaux d'intérêt général. Et contre toute attente, entre l'ado rebelle et la vieille dame se noue une amitié improbable. C'est qu'au fond, ces deux-là ont beaucoup plus en commun qu'il n'y paraît, à commencer par une enfance dévastée...

MON AVIS :

Née en Angleterre, Christina Baker Kline a grandi dans le Maine, aux États-Unis. Auteur de cinq romans et essais, c'est avec Le Train des orphelins, inspiré de l'histoire familiale de son mari, qu'elle a véritablement découvert le succès. Le Train des orphelins est son premier roman à paraître en France. De l'Irlande des années 1920 au Maine des années 2000, en passant par les plaines du Midwest meurtries par la Grande Dépression, c'est un roman ample et lumineux, dans lequel s'entremêlent les voix émouvantes de deux orphelines, ballottées de foyers en foyers mais c'est aussi le prétexte pour l'auteure de revisiter tout un pan méconnu de l'histoire de l'immigration américaine.

Grâce au récit poignant de l'enfance de Vivian Daly, une vieille dame irlandaise de 91 ans, Christina Baker Kline revient sur la déportation de milliers d'enfant pauvres, maltraités, abandonnés ou orphelins, que l’on envoyait par trains entiers depuis la côte est des États-Unis vers le Midwest, entre 1854 et 1929. À l'origine de ce mouvement, un ministre méthodiste, Charles Loring Brace, qui, en réaction à l'augmentation drastique de la population d'orphelins et d'enfants abandonnés vivant dans les rues de New-York durant l'époque industrielle, a fondé la Children's Aid Society, une œuvre de bienfaisance, destinée à offrir une vie meilleure à ces enfants défavorisés en les relogeant dans des familles rurales du Midwest américain. Les orphelins de tous âges, recueillis par l'institution, étaient alors encadrés par deux ou trois adultes puis chargés dans des trains en partance pour les États de l'ouest. Ce sont ces trains, les trains des orphelins, qui ont donné leur nom à ce mouvement.

Au début du roman, l'auteure décrit très bien comment ces enfants voyageaient durant des centaines de kilomètres dans des conditions effroyables et faisaient halte dans un certain nombre de petites villes où les autorités locales avaient réuni les familles qui souhaitaient adopter un ou plusieurs enfants. Présentés sous leur meilleur jour, les enfants étaient alors regroupés, parfois dans une salle, parfois même dans la gare où ils arrivaient, puis exposés comme pour une foire aux bestiaux. Ces orphelins étaient adoptés gratuitement sous réserve qu'ils aident leurs parents adoptants dans divers travaux de la ferme ou de la vie domestique. Les adoptants, eux, n'ayant pour seule obligation que d'offrir aux enfants une vie meilleure...

«Peut-être que quelqu'un voudra de moi. Peut-être vais-je avoir une vie dont je n'aurais jamais rêvé, dans une maison lumineuse et confortable, où il y aura plein à manger, du cake tiède et du thé au lait aussi sucré que je le désire.»

«Alors que nous examinons les gens qui se mettent en file indienne et commencent à gravir les marches qui mènent à l'estrade, j'ai l'impression d'être une vache, comme celles de la foire agricole de Kinvara où mon grand-père m'emmenait.»

Bien que Christina Baker Kline se garde de tout jugement, le lecteur, lui, comprend très vite les dérives de ce mouvement qui,  sous couvert d'une bonne dose de valeurs chrétiennes, avait surtout pour but de désengorger les orphelinats, vider les rues surpeuplées de New-York et les débarrasser de leurs délinquants et vagabonds. Comment ne pas s'indigner de voir ces enfants examinés et palpés comme lors d'un marché aux esclaves ! Parce que la Children's Aid Society n'avait mis en place aucun moyen de vérification du bien-être des enfants qu'elle s'occupait de reloger, on comprend que dans de très nombreux cas, il s'agissait surtout pour les familles adoptantes d'obtenir un supplément de main d'œuvre gratuite, les enfants devenant en quelque sorte des esclaves des temps modernes, corvéables à merci !

La petite Vivian, âgée de 7 ans à l'époque et tout récemment arrivée d'Irlande, raconte comment elle en est venue à embarquer à bord d'un de ces trains des orphelins, sans savoir qu'elle vivra un long et cruel voyage et sera quasiment réduite en esclavage pendant toute son enfance... C'est tout simplement révoltant !

«Qu'elle est misérable votre enfance quand on se dit que personne ne vous aime ou n'a envie de s'occuper de vous, lorsque l'on est toujours l'étranger qui contemple du dehors ce qui se passe à l'intérieur. J'ai l'impression d'avoir dix ans de plus que mon âge. J'en sais trop. J'ai été témoin du pire dont sont capables les gens, je les ai vus désespérés et égoïstes, et le fait d'avoir vu cela m'a rendue méfiante. Alors j'apprends à faire semblant, à sourire et à hocher la tête, à faire montre d'une empathie que je ne ressens pas. J'apprends à me fondre dans la masse, à ressembler à tout le monde, alors même qu'intérieurement je me sens brisée.»

Pourtant, si l'enfance de Vivian a été semée de drames et de catastrophes, son histoire aura également son lot de réjouissances.

«C'est donc dans la nature humaine de croire qu'il y a une raison à toutes choses et de se dire que mêmes les pires expériences ont une signification, si insignifiantes soit-elle ?»

Résilience, générosité et transmission sont au cœur de ce roman terriblement émouvant, inspiré à Christina Baker Kline par une surprenante histoire de famille...

Le train des orphelins est une magnifique et bouleversante reconstitution d'un épisode méconnu de l'Histoire des États-Unis. Une histoire exceptionnelle, poignante, comme un cri du cœur...

Je remercie les éditions Belfond de leur confiance.

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Commentaires
C
La BD, Le train des orphelins, m'a permis de lever le voile sur ce scandale. Je suis sûre que ce roman qui traite du même thème, le fait avec encore plus d'émotions et de profondeur.<br /> <br /> J'en ferai sûrement l'acquisition. Merci Ingrid pour ton avis
C
Il me tente énormément !!
C
J'ai trop hâte de le sortir de ma PAL, je pense qu'après les derniers SP ce sera l'un des premiers à sortir. ^^
L
J'ai vraiment beaucoup aimé ce livre :)
H
En voilà un sujet intéressant ! Je note ! Merci beaucoup !
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